Il était venu en voisin rendre une petite visite à son ami Jean-Paul Belmondo qui y possédait une villa. C’est donc chez Bébel que j’ai vu Johnny pour la première fois, en chair et en os.
Je m’en souviens comme si c’était hier… on était avec Jean-Paul en train de faire une partie de Dames chinoises au bord de la piscine tout en sirotant des Piñacoladas lorsque Johnny a débarqué.
Il a claqué trois bises à l’ami Belmondo, m’a gentiment serré la louche puis il s’est foutu à poil et a piqué une tête direct dans la piscine en poussant le cri de Tarzan. Un cri qui résonne encore dans mes oreilles plus de trente ans après tant il donnait la pleine mesure de cette voix hors du commun.
Les heures qui ont suivis, on a pas mal discuté, pas mal rigolé et aussi, il faut bien le dire, pas mal picolé…
Le soir, après avoir bouffé au « Bistrot d’Alain », la seule table à peu près correcte à l’époque à Antigua, on a été au Casino. Johnny a perdu plus de 10.000 dollars mais ça a pas eu trop l’air de le perturber ... n’empêche qu’au retour, c’est moi qui ai du raquer le taxi.
Je le revois encore devant la table du Black Jack, Montecristo nº2 aux lèvres, en train de s’enfiler whisky sur Whisky, quasiment comme si c’était de la flotte.
D’ailleurs c’est justement à ce moment-là, après avoir avalé une gorgée, qu’il m’a dit :
- Hey au fait alaouet, toi qu’est cultivé, comment on dit pour un truc où y’a que de la flotte dedans ?
- Quand y’a que d’la flotte dedans, Johnny, on dit « aqueux »
- Aqueux ? T’es sérieux ? « Aqueux » comme un bordel aqueux ?
Et le voilà qui explose de rire. Parce qu’on dira c’qu’on voudra mais le Johnny, il avait quand même un sacré sens de l’humour !
Il n’empêche que c’est depuis ce jour-là que Johnny s’est mis à dire « Aqueux » à tout bout d’champ, comme une sorte de private joke qu’on était que quelques-uns à comprendre.
Puis on s’est revu l’année d’après à Saint-Tropez où j’étais venu me reposer quelques jours. Il avait loué un yacht pour trois semaines et m’a invité à une soirée privée.
Il y avait vraiment du beau linge ! Eddy Mitchell, Ornella Mutti, Jacques Dutronc, Guy Drut, Catherine Deneuve, Michou, Mireille Darc, Gérard Depardieu, Geneviève de Fontenay, Paul Mc Cartney, Pamela Anderson…
Soirée sympa – champagne et coke à gogo – et assez déshabillée, il faut bien le dire.
Je me souviens qu’à un moment, alors que je me faisais masser par Ornella Mutti, Johnny m’a demandé :
- Hey Alaouet, quand t’auras fini avec Ornella, tu nous ferais pas un petit air de piano à queue ?
En fait, Pamela Anderson m’a appris plus tard que c'était elle qui lui avait suggéré cette idée car elle était affreusement jalouse de voir Ornella me faire des mamours, mais ceci est une autre histoire…
Je me suis donc mis au piano et ma foi, ce fut un grand moment ! Fallait voir toutes ces beautés en transe qui me dévoraient du regard tandis que j’improvisais en direct des airs qui allaient plus tard devenir de grands standards internationaux. Et puis Johnny s’est mis à chanter et là, j’peux vous le dire, on a carrément allumé le feu dans la baie de Saint-Tropez.
Ensuite, c’est bien simple, avec Johnny, on ne s’est plus quittés ! J’étais de toutes ses fêtes, de toutes ses virées.
Le problème, c’est qu’à l’époque il faisait tellement la fête que sa carrière a sérieusement commencé à s’en ressentir, à tel point qu’on l’invitait de moins en moins à la TV, qu’il passait de moins en moins à la radio, que ses ventes s’affaissaient…
Alors un beau jour, je lui ai dit :
- Johnny, c’est bien gentil tout ça, la fiesta, la picole, le jeu et les nanas mais tu ne peux pas continuer comme ça ! Pense à tes fans que tu déçois, à la tristesse de tes proches, et de ton percepteur !
Il s’est mis à pleurnicher sur mon épaule :
- Ouiiiin mon petit Alaouet, j’y arrive plus, j’ai plus de voix, j’ai plus d’idées, plus d’envies, plus d’énergie, j’y arrive pluuuuuuus
Alors j’ai décidé de prendre les choses en main. De ce jour, je suis devenu son coach, et patiemment, jour après jour, semaine après semaine, j’ai œuvré à remettre Johnny en selle.
En lui écrivant des chansons, en lui donnant des conseils pour placer sa voix, en lui faisant travailler son jeu de scène… en lui redonnant confiance en lui ! Et petit à petit, grâce à mon travail acharné et mon soutien de chaque instant, Johnny est redevenu JOHNNY !
Évidemment, sans moi, Johnny n’aurait jamais fait une telle carrière et connu un tel succès. Mais je n’en parle ici que dans un souci de vérité car j’ai toujours préféré l’ombre à la lumière et ça me faisait vraiment plaisir de voir mon pote réussir tout en sachant au fond de moi que c’était entièrement grâce à mon dévouement.
Je ne vais pas vous raconter tous les souvenirs que j’ai de notre complicité et de tous ces merveilleux moments que nous avons partagés ensemble mais ce fut vraiment une belle amitié comme j’en ai rarement connue à part peut-être avec Mick Jagger et Stephen Hawking, mais ceci est une autre histoire…
Mais voilà, tout a une fin…
Un soir, lors d’une interview au Journal de 20h, à la question : comment vous est venue l’idée d’écrire la chanson « les portes du pénitencier ? » Johnny a répondu :
- En regardant un épisode de « Columbo » sur TV Breizh.
Alors qu’il savait pertinemment que c’était moi qui avait écrit cette chanson l’année précédente en regardant « Les feux de l’amour » chez Chantal Goya !
Parce que les amis, on peut leur pardonner plein de choses, de picoler, de se droguer, de nous emprunter de la thune, de mettre du ketchup dans le couscous, mais mentir, ça non, je ne supporte pas.
Et pire encore que les menteurs, ce que je déteste, ce sont les my******es !!
Alors, Adieu Johnny, et bonne route car désormais, ce sera sans moi !
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